Un contrat de service public Etat-SNCF pour sauver les services ferroviaires Intercités : le matériel roulant (3)
Troisième partie de l'étude sur les services ferroviaires Intercités et les propositions de la FNAUT.
3. Le renouvellement du matériel roulant
A la demande du MEEDDM, la FNAUT a précisé les attentes des voyageurs concernant le matériel destiné à remplacer les voitures Corail, introduites en 1975. Ces attentes ont été présentées sous la forme d’un dossier fonctionnel et non technique.
Le matériel de jour
Ce matériel renouvelé doit offrir une nouvelle image du transport ferroviaire. Le voyage ferroviaire doit être perçu et vécu comme un moment de détente, de confort, de calme, tout en pouvant être mis à profit pour une occupation ludique ou professionnelle, ce qui constitue un avantage propre du train sur la voiture et le car.
Les durées des voyages pouvant être plus élevées en trains Corail qu’en TGV, il est encore plus important, en contrepartie, que confort et services à bord y soient de niveau élevé.
Une erreur stratégique consisterait à définir un matériel “au plus juste“ aujourd’hui, ce qui conduirait à une économie à court terme mais pénaliserait fortement le bilan d’exploitation sur la durée de vie du matériel. Les fonctionnalités demandées par la FNAUT relèvent d’exigences qui ne sont pas, dans bien des cas, à l’origine de surcoûts importants.
Ces exigences tiennent compte de l’amélioration de la concurrence routière et aérienne.
+ Le matériel doit pouvoir couvrir l’ensemble des liaisons à courte, moyenne et longue distance entre grandes villes ainsi que les liaisons de cabotage entre villes moyennes.
Un diesel assurait encore la traction de nombreux intercités (Ici à Vierzon)
+ Rame tractée par une locomotive ou rame automotrice ? Les deux formules présentent des avantages et des inconvénients, et répondent à la diversité des besoins.
+ Les services à bord - restauration, espaces pour les bagages et les vélos, emplacement destiné au personnel de bord - doivent être disponibles pour l’ensemble des voyageurs, même en absence d’intercirculation.
+ La traction doit être multimode (thermique, électrique, tous courants), pour permettre des liaisons directes au passage d’une ligne électrifiée à une ligne qui ne l’est pas. Le matériel doit être réversible pour limiter les temps de stationnement en cas de rebroussement.
+ La vitesse doit atteindre 200 km/h. Des performances “traction-freinage“ élevées sont nécessaires, pour les dessertes à longue distance comme pour le cabotage.
+ La modularité des compositions est un avantage spécifique du rail. Elle doit être pleinement valorisée (pointes de trafic, transports de groupes, exploitation de trains à tranches multiples).
TGV Nantes-Marseilles passant par Saumur. La solution TGV est à proscrire dans les dessertes de type Corail...
+ Les trains Corail comportent souvent plus d’arrêts que les TGV. La solution TGV (faible nombre de portes, ouverture lente) est à proscrire. Par rapport au matériel Corail actuel, le niveau du plancher doit être abaissé. Les personnes à mobilité réduite doivent disposer d’un accès autonome facilement repérable dans au moins une voiture par tranche exploitée.
+ Une intercirculation large doit garantir un passage fluide des voyageurs handicapés, du personnel de bord, du service de restauration.
+ Il est essentiel que le confort (sièges inclinables avec accoudoirs, tablettes, porte-bagages et porte-vêtements, poubelle, prises de courant, accès à internet) soit au standard “grandes lignes“. Même sur des trajets d’une heure, le confort des voitures Corail est très apprécié. Sur Marseille-Briançon (4h30), les AGC font regretter le confort des dessertes Corail antérieures.
+ Une bonne visibilité sur l’extérieur doit être offerte à toutes les places, sans exception.
+ Des espaces variés sont nécessaires pour éviter la monotonie : compartiment, couloir central, coin téléphone, espace famille, coin jeux, bar. L’enquête menée récemment par la SNCF sur le confort du train du futur ne doit pas être limitée au seul TGV.
+ Un éclairage collectif à deux niveaux, jour et nuit, et un éclairage individuel doivent être disponibles, de même qu’une climatisation à température réglable par espace : de nombreux voyageurs se plaignent du froid dans les Corail comme dans les TGV.
Toilettes de Corail sur Nantes Bordeaux il y a quelques années
+ Les toilettes doivent être plus robustes, plus propres et plus nombreuses.
+ La décoration doit être acceptable par toutes les catégories et tranches d’âge de la clientèle.
La FNAUT a aussi rassemblé des suggestions variées concernant les services à bord :
réservation (non obligatoire) et affichage des places réservées, transport des vélos et des skis, restauration, nursery, nettoyage en cours de voyage, information sonore et visuelle (horaires, correspondances), disponibilité du personnel de bord.
Le matériel de nuit
Malgré l’extension des LGV, les trains de nuit ont encore un rôle important à jouer sur divers itinéraires nationaux et internationaux, parfois associé au transport des voitures.
Deux types d’offres sont nécessaires :
+ des places assises très confortables et bon marché, permettant au train de reprendre des parts de marché à la voiture et à l’avion à bas coût, mais aussi au car à l’international ;
+ des places couchées avec un rapport qualité/prix très sensiblement amélioré, alternative crédible en confort et gain de temps au voyage diurne en voiture, en train ou en avion.
+ La modularité des compositions des rames est essentielle, comme pour les relations diurnes.
+ L’amélioration du rapport qualité-prix peut s’obtenir de manière économique par l’utilisation de matériel de grande capacité, par exemple avec des voitures à deux niveaux.
+ Les rames doivent être sécurisées pour permettre des arrêts en pleine nuit afin de desservir certaines villes moyennes : couloirs télé-surveillés depuis le local du personnel de bord ; accueil filtré à partir d’un nombre limité de portes, les autres portes étant maintenues fermées.
Etat des Corails il y a quelques années
+ Les aménagements intérieurs doivent permettre indifféremment des circulations nocturnes et diurnes. Des circulations complémentaires de jour, pour des dessertes de cabotage, permettraient, à vitesse modérée mais à haut niveau de confort, d’augmenter la productivité du matériel. Cette pratique est courante en aviation civile : en quelques dizaines de minutes, les sièges des avions sont enlevés pour assurer des dessertes nocturnes pour le fret et la poste.
+ Pour les places assises, le concept actuel des voitures à sièges inclinables peut être reconduit tel quel, avec les mêmes améliorations que celles attendues pour les relations diurnes, mais avec du matériel de grande capacité, comme pour le TGV et le TER. Un semicompartimentage des voitures est souhaitable pour assurer la tranquillité des voyageurs lors des arrêts intermédiaires en regroupant les réservations par destinations.
+ Pour les places couchées, il faut, dans les deux classes, un niveau de confort intermédiaire entre celui de la voiture-couchette actuelle et celui des voitures-lits allemandes ou des trainshôtels espagnols. Le modèle à suivre est l’hôtel “low cost“ transposé au train de nuit :
compartiments à 4 couchettes ou 2 lits, personnel réduit, services automatisés, douches et toilettes communs, espaces fonctionnels et couchages confortables.
+ Comme l’accueil, la restauration doit être regroupée en quelques “points-services“ du train, et organisée comme dans les hôtels “low cost“ en espaces buffet automatisés. Le personnel doit pouvoir “accompagner“ ce service et vendre aussi à la place dans les compartiments-lits.
Pour les très longs parcours avec des départs relativement tôt, un service plus complet, de niveau analogue à celui des trains de jour, est souhaitable.
+ Chaque compartiment équipé de places couchées doit disposer d’un système d’appel et de contact avec le “point-service“ et d’une fonction réveil automatique, afin de libérer le personnel de bord et le rendre plus disponible pour accompagner le service de restauration et assurer la vente à la place dans les compartiments-lits.
A suivre ...
Conférence de presse du 7 mai 2010 sur
" Les services ferroviaires Intercités : propositions de la FNAUT pour un contrat de service public Etat-SNCF"