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Publié par Fnaut Pays de la Loire

 

Même si cette lettre est parvenue en avril 2012, en réponse à un questionnaire de l'Association TDIE, le contenu donne des informations utiles sur la future politique des transports du nouveau président qui viennent compléter les réponses données à la FNAUT...


La personnalité choisie pour devenir premier ministre ou pour sièger au ministère du Développement Durable sera déterminante... En effet lors de la constitution du gouvernement, la nomination de Jean Marc AYRAULT par exemple, au poste de Premier Ministre, serait un message envoyé aux opposants de l'aéroport de Notre Dame des Landes... 

 

 

 

 

 

Monsieur Philippe DURON

Monsieur Louis NEGRE

Présidents

TDIE

9, rue de Berri

75008 PARIS

Paris, le 5 avril 2012

 

 

Messieurs les Présidents,

 

 

Par votre courrier daté du 14 février dernier, vous attirez mon attention et souhaitez connaître les orientations politiques que je défends en matière de transport et mobilité. L’organisation de la mobilité des personnes et des marchandises sont, à mes yeux, d’une importance centrale pour nos concitoyens, car comme vous le relevez, les transports et la mobilité sont porteurs d’enjeux fondamentaux pour notre pays, sociétaux, mais aussi économiques et écologiques. Je tiens d’ailleurs à vous remercier une nouvelle fois de m’avoir transmis le Livre Blanc sur la Mobilité de TDIE, édition Mobilité 2012-2017.

 

Je suis pleinement conscient de la nécessité de remettre les politiques publiques de transport au coeur des problématiques de développement durable. Il est vrai que, de reculs en abandons, le Grenelle de l’Environnement, pourtant adopté à l’unanimité par la Représentation nationale, s’est soldé par une occasion manquée. Le fret ferroviaire, qui devait pourtant faire l'objet d’une attention et d’un soutien particulier des pouvoirs publics, a vu sa part modale s’effondrer au cours des cinq dernières années (de 15% à 9% aujourd’hui) ; les autorités organisatrices de la mobilité durable n’ont toujours pas vu le jour, malgré le consensus qui s’était dégagé sur ce point lors des comités opérationnels du Grenelle ; faute d’une ressource dédiée, les Régions ne sont aujourd’hui plus totalement en mesure d’assurer le financement du service public des TER ; il n’existe à ce jour aucun plan de financement viable du schéma national des infrastructures de transport (SNIT), réduit à un simple empilement de projets non hiérarchisés ; la gouvernance du système ferroviaire ne répond manifestement pas aux attentes d’un train efficace et sûr ; enfin, l’État n’a pas su pleinement accompagner l’effort considérable des collectivités territoriales en matière de développement de l’offre de transports.

 

Depuis de trop nombreuses années, nos concitoyens pâtissent de réseaux de transports publics saturés et inadaptés à la demande. Faute d’avoir consacré les investissements nécessaires à sa modernisation, le réseau ferré national (RFN) n’est aujourd’hui plus en état d’absorber la croissance du trafic. La qualité du service s’est considérablement dégradée et la situation de certaines parties du réseau est critique, tout particulièrement en Île-de-France, où le réseau francilien est proche de l’asphyxie. Songeons au fait que le RER A transporte à lui seul 1 million de voyageurs par jour. C’est plus que l’ensemble des lignes TGV.

 

.../...

C’est pourquoi priorité doit être donnée aux transports du quotidien. Il faut tout d’abord rénover le réseau ferroviaire existant – les réseaux fluvial et routier doivent d’ailleurs l’être également, car ils se sont fortement dégradés ces dernières années. Concentrer les politiques et les investissements publics sur ces transports du quotidien est la clé de la réussite de toute politique de report modal. Cela passera par le lancement d’un troisième appel à projets de transports en commun en site propre (TCSP) pour atteindre l’objectif de 1500 km de TCSP à l’horizon 2020. Cet appel à projets devra tout particulièrement mettre l’accent sur la desserte des quartiers sensibles vers les bassins d’emplois et les services publics, afin d’accroître l’employabilité des populations les plus frappées par le chômage et de renforcer la solidarité territoriale. Il pourra être élargi à l’ensemble des outils de la mobilité durable et encouragera l’inscription des projets dans une stratégie globale de déplacements et d’aménagement durables. Cette initiative est d’autant plus nécessaire qu’elle participera au soutien de la croissance, en générant de l’activité pour les filières de l’industrie ferroviaire et des travaux publics et en créant des emplois non-délocalisables.


Il faut par ailleurs donner aux transports publics un avantage comparatif significatif par rapport à la voiture individuelle. A cet égard, il faut reconnaître que la coordination des différentes offres de transports (TER, lignes interurbaines, tramway, vélo, auto-partage, etc.) reste encore insuffisante. Le renforcement de l’intermodalité dans un cadre plus décentralisé constituera l’autre axe majeur de la politique des transports que j’entends mettre en oeuvre. Il faut également retravailler le lien entre aménagement des territoires et politique de transport de façon à réduire à l’avenir les déplacements imposés, éviter les déplacements inutiles et organiser au mieux les flux. C’est pourquoi je propose de faire des autorités organisatrices de transports de véritables autorités organisatrices de la mobilité durable compétentes sur toutes les composantes de la mobilité et de renforcer les Régions à la fois dans leurs missions d’autorités organisatrices des transports ferroviaires et dans leur rôle de coordination de l’offre de transports à l’échelle régionale. L’essor des véhicules du futur, propres et consommant peu d’énergie, doit être encouragé, car la voiture reste pertinente aujourd’hui sur de nombreux territoires.

 

En matière d’infrastructures nouvelles, le Président de la République a promis durant son quinquennat un grand nombre de projets, dont je suis obligé de constater qu’ils restent, à ce jour, sans solution de financement. Le Schéma National des Infrastructures de Transport (SNIT) affiche en effet 245 Mds€ de dépenses soit, pour la seule part de l’État, 45 années du budget de l’Agence de Financement des Infrastructures de Transport de France (AFITF). Le budget de l’AFITF est aujourd’hui largement contraint par les projets déjà engagés et par des dépenses incompressibles d’accessibilité ou de mise en sécurité d’itinéraires. Au-delà, il conviendra donc d’établir des priorités dans le temps à partir de critères socio-économiques et écologiques objectifs en tenant compte des engagements susceptibles de nous lier pour l’avenir. Je souhaite favoriser notamment les infrastructures ferroviaires, maritimes et fluviales. Il faut, il me semble, agir de manière urgente sur le fret ferroviaire, parce qu’il connaît de grandes difficultés, mais aussi parce qu’il est le moyen de transport le mieux à même de répondre aux enjeux environnementaux et aux objectifs de report modal. Bien qu’inscrit dans le Grenelle de l’Environnement, le report modal annoncé dans le transport de marchandises par le candidat sortant n’a pas eu lieu. Le transport routier représente désormais 83,4 % du transport de marchandises contre 9,4 % pour le fer. Depuis 2002, le trafic du fret ferroviaire a ainsi chuté de 45 %.

.../...

Pour ce qui concerne plus particulièrement la compétitivité des ports français, elle ne cesse de chuter depuis vingt ans. Entre 2007 et 2011, le trafic des sept grands ports maritimes a reculé de près de 10%. En juillet dernier, un rapport du Sénat a conclu que la réforme engagée par le Gouvernement en 2010 était insuffisante à enrayer le déclin des grands ports maritimes français et n’avait pas produit les effets escomptés. La réforme portuaire, qui s’est concentrée sur la privatisation du dernier segment, a en effet fait l’impasse sur l’effort de rattrapage nécessaire de l’investissement public pour permettre à nos grands ports de s’adapter à la demande mondiale. En outre, leurs dessertes ferroviaire et fluviale doivent être renforcées – 50% de la desserte terrestre du Bénélux est aujourd’hui assurée par voie fluviale et ferroviaire quand 85% de la desserte du port de Marseille est assurée par la route. L’enjeu à terme est bien de pouvoir combiner les différents modes de transport sans rupture de charge de la marchandise. À ce titre, les démarches en faveur des Autoroutes de la mer me semblent devoir être également approfondies.

 

Concernant la politique européenne de libéralisation des transports ferroviaires, je considère que la concurrence n’est pas la solution pour réaliser une Europe du rail qui s’est historiquement construite sur la coopération – et non sur la compétition – entre les entreprises ferroviaires. Le bilan de la régionalisation ferroviaire depuis 2002 montre d’ailleurs que c’est le retour de l’investissement public qui a permis une augmentation de la fréquentation du TER chaque année depuis 10 ans de +5,4% et de plus 70% depuis les premières expérimentations de 1997. La concurrence n’est pour rien dans ces résultats. Pour éviter que ne se reproduise le désastre du fret, il me paraît indispensable que l’Europe tire d’abord le bilan du mouvement de libéralisation déjà engagé. Par ailleurs, il n’est pas question de faire du « social » un enjeu de la concurrence. Enfin, le statut des cheminots ne doit pas être remis en cause. En tout état de cause, la concurrence ne se fera pas par le dumping social. Quant à la gouvernance du système ferroviaire, il m’apparaît que l’État a déserté le champ de ses responsabilités en renonçant à fixer les principes de son organisation et les règles du jeu de son fonctionnement. Le système doit donc être réformé. Je considère pour ma part que cette réforme devra respecter plusieurs principes. Les responsabilités devront être clarifiées. L’État reprendra le pilotage du système à partir des grandes orientations qui seront décidées par le Parlement. L’ensemble des parties prenantes – y compris, bien entendu, les organisations représentant les personnels concernés – seront associées à cette réforme. Sans anticiper sur ces orientations, il me paraît admis que les fonctions du gestionnaire de l’infrastructure devront être unifiées pour conforter l’efficacité économique et la sécurité juridique de notre organisation. Enfin, les relations entre le gestionnaire de l’infrastructure, les opérateurs ferroviaires et les autres acteurs du système ferroviaire seront clarifiées avec pour priorités le respect absolu des exigences de sécurité, l’exclusion des conflits d’intérêt et la mise en place des conditions favorables à la modernisation et au développement de nos transports ferroviaires, si essentiels à la vie quotidienne de nos concitoyens et aux besoins de la nation. C’est en fonction de ces priorités que sera arrêté le scénario d’organisation de notre système ferroviaire.

 

De telles politiques ne pourront être mises en oeuvre sans les financements adéquats. Le versement transport ne suffit plus à financer les investissements et l’exploitation des réseaux de transports. Qui plus est, les Régions n’en bénéficient pas. J’entends doter ces dernières d’une ressource dédiée aux transports régionaux. Le financement des transports publics devra également passer par la fiscalité écologique. Je mettrai en place le principe de pollueur-payeur afin de favoriser le transfert modal en faveur des transports ayant un meilleur rendement énergétique. À ce titre, la taxe poids lourds et la directive « Eurovignette III » me semblent aller dans le bon sens.

 

 

 

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